Pistonnée, comment assurer?


Pistonnée, comment assurer ?

Ce poste vous l'avez eu... un peu grâce à une de vos connaissances qui a mis votre dossier en haut de la pile. Et ça suscite des commentaires...
SANDRINE CATALAN-MASSÉ


Le piston, tout le monde en rêve, y compris pour la plus petite chose : passer à la caisse sans faire la queue, etc. Mais tout le monde râle si c'est un autre qui en bénéficie. « Cela réveille des jalousies infantiles », révèle la psychanalyste et coach Luce Janin-Devillars. On fait face...

On évite la parano

Chaque fois que vous entrez dans le bureau vous avez l'impression que tous les regards vous scrutent. C'est certain, les autres vous en veulent de votre promotion. «Peut-être, mais c'est avant tout notre propre regard, projeté sur nous-même, qui est en jeu, explique Sylvie Protassieff, psychologue clinicienne et psychanalyste. Par ce sentiment de paranoïa, on cherche à faire porter aux autres les choses qu'on pense soi-même, sur nous : avoir obtenu quelque chose d'indu. »


On réagit comment? Inversez votre façon de penser: «Je n'aurais pas été pistonnée si je ne l'avais pas mérité.» Puis dosez l'importance à accorder aux regards des collègues et le lien que vous devez maintenir avec eux pour que tout se passe bien. Proposez d'aller déjeuner, de donner un coup de main, voire d'en demander un. Les collègues aimeront votre soutien, et apprécieront encore plus d'entrevoir des points faibles chez vous. Dans certains cas, apportez votre écoute bienveillante. Ecouter l'autre, c'est déjà lui indiquer qu'il a de la valeur. Ça le soulage et ça vous protège.

On ne le crie pas sur les toits

Pour crever l'abcès et passer à autre chose, vous avez tendance à provoquer les occasions pour vous justifier : «Je suis arrivée ici parce que je connaissais très bien le dossier, parce que j'ai bac + 5 ou une licence de chinois... » «En général, on se justifie trop quand on se sent coupable ou qu'on a un sentiment d'usurpation, explique Sylvie Protassieff. C'est parfois le cas lorsqu'on a eu une éducation culpabilisante.» Luce Janin-Devillars ajoute: «Se justifier, c'est alors entrer dans la honte de soi, comme si on avouait quelque chose de mal à un parent fâché. »


On réagit comment? Assumez avec dignité. Plutôt que des discours, il n'y a pas meilleur moyen que l'action pour faire taire les ragots. Et évitez soigneusement les conversations de couloir ou à la machine à café.

On joue la carte de l'honnêteté

Si vous n'en parlez pas spontanément, vous n'éludez pas pour autant les questions de l'entourage. Soyez honnête, et dites les choses sans rien essayer de cacher. «La parole nous libère, elle nous permet de nous assumer tels que nous sommes, ni pires ni meilleurs. Elle agrandit notre espace de liberté », explique Luce Janin-Devillars. Sylvie Protassieff préfère tempérer, en précisant : «Tout dire est également nuisible. On cherche à combler l'autre, à lui apporter la réponse qu'il attend, pour être accepté. Mais on prend le risque de ne pas être aimé du tout, car on n'apportera jamais assez de réponses. »


On réagit comment? Répondez seulement aux questions qui vous semblent intéressantes, constructives, qui ne vous dévalorisent pas ou n'empiètent pas sur votre intimité. Exprimez-vous calmement, sans forcément contrer toutes les objections, mais sans tomber dans la victimisation ni dans l'arrogance (« J'étais la seule à pouvoir assumer cette fonction! »). Et, en tout état de cause, évitez les phrases négatives, du type : «Je n'ai pas été pistonnée », car elles sont toujours comprises à l'envers.

On reste lucide

Sur vos capacités, sur la chance qui vous a été donnée — le piston c'est aussi ce qu'on appelle le réseau — et sur les efforts qu'il vous reste à fournir pour être à la hauteur de votre poste. « La lucidité, c'est la capacité à discerner le fantasme et la réalité, précise Luce Janin-Devillars. Le fantasme appartient aux collègues, la réalité vous revient: vous avez fait les études nécessaires, vous avez beaucoup bossé. Car être lucide c'est aussi être capable de s'estimer à sa juste valeur sans attendre le satisfecit de la famille professionnelle, qui ressemble fort à votre famille tout court. »


On réagit comment? Prenez des initiatives, allez demander régulièrement à votre N+ 1 si ce que vous faites correspond ce qu'il attend. En général, cela a un effet très positif: vous ne vous reposez pas sur les lauriers, éphémères, du coup de piston.



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