Certains ont besoin de faire pour exister


Faire plus, faire mieux... D'où vient cette manie de toujours faire? Luce Janin-Devillars(1),psychologue clinicienne, psychanalyste et coach, Lève le voile sur un processus qui complique bien des vies.


« Ceux qui ne parviennent pas à s'arrêter, à déléguer ou simplement à se poser pour respirer ont besoin d'être actifs pour se sentir vivants. Ils ont souvent, enfants, été sommés de faire : travailler à l'école, mais aussi jouer du piano, pratiquer le judo, etc. Ni place, ni temps pour le rêve, l'ennui, les bêtises.

En grandissant, ces personnes intériorisent les attentes et les projections de leurs parents anxieux. Ainsi se construisent une "image idéale du moi", une représentation parfaite de soi-même, et une exigence de performance que viennent renforcer les normes sociales actuelles - l'absence d'activité est suspecte d'un point de vue culturel, les chômeurs le savent bien... Ces personnalités se construisent ainsi autour de la peur du vide. Il s'agit d'un déficit identitaire, d'un vide intérieur qu'il faut à tout prix combler à l'extérieur par l'action.

Quand ils font, ils sont. S'ils arrêtent de faire, l'anxiété monte, le sentiment de perdre toute épaisseur s'installe, comme une petite mort d'eux-mêmes.

Alors la course effrénée continue. Mieux, elle fournit son bénéfice : une fatigue psychique et physique qui va légitimement éviter une remise en question du processus : "Je suis 'overbooké'". "Je suis à plat", et, dès lors, j'évite de penser et d'éprouver l'angoisse. Les plaintes à l'entourage sont un moyen d'exprimer un épuisement, bien sûr. Mais elles viennent surtout demander cette reconnaissance dont nous avons parlé. C'est un appel à plus de valorisation, à plus d'amour : "Regarde tout ce que je fais, j'existe, aime-moi!"

Un tel mécanisme inconscient engendre un dysfonctionnement psychologique qu'il est toutefois possible de réparer. Il convient d'apprendre que les creux, les baisses, l'imperfection en somme, est ce dont nous sommes faits. Aussi. »

Certains ont besoin de faire pour exister